Avoir des opérateurs et opératrices compétents, engagés à coopérer pour faire un travail de qualité, autonomes et capables de prendre des initiatives pour se débrouiller avec tous les aléas du travail ? Que ce soit sur une ligne en usine, dans un service ou sur une aile d’avion : c’est le rêve de tous les chefs !
C’est aussi une des clés de la survie de la maison France en Europe et dans le Monde. Enfin, si l’on espère que le travail de production ne finisse pas par être totalement délocalisé.
Et donc s’il n’y a pas ou pas assez d’opérateurs compétents et autonomes, y compris dans une entreprise aussi emblématique qu’Airbus. Et que l’on veut pourtant fabriquer des avions totalement fiables et compétitifs, comment fait-on ?
On peut rentrer dans le sujet par les KPI, la multiplication des procédures et du reporting, l’accélération des cadences, les économies sur la masse salariale. Les récents déboires de Boeing montrent que lorsque la finance commande le métier, le métier finit par se venger : des avions perdent leur porte, voire tombent. Et l’action Boeing finit aussi un jour par dégringoler.
Sophie Aubert, une ergonome aussi fine que déterminée, travaille sur ce « petit » sujet depuis 1996 chez Airbus : comment développer l’autonomie des opérateurs en situation de travail ?
Prenons un exemple.
Airbus manque de peintres. La peinture sur une carlingue d’Airbus, disons que ce n’est pas exactement de la déco.
On recrute des peintres carrossiers dans l’automobile. On les met en formation dans un embryon de centre de formation interne. Théorie le matin, application sur des tôles de 1 m2 l’après-midi.
Résultat : au bout de trois mois, 40 % de démissions. Et ceux qui restent ? Ils sont rejetés par les expérimentés. La transformation du dispositif de formation des peintres en partant d'une analyse du travail a permis d'accélérer l'acquisition de l'autonomie des opérateurs et de réussir les intégrations.
Si la qualité de la peinture est importante aux yeux des compagnies aériennes clientes, la qualité de l'assemblage de l'avion et de tous ses systèmes est cruciale dans cette industrie. Ce n'est pas pour autant simple de transformer les dispositifs de formation...
Alors que fait Sophie Aubert ? Elle va nous partager les principes qui la guident et ses interventions. Qui ont eu beaucoup de mal à être entendus au début. Car les questions humaines dans un monde d’ingénieurs rationnels, d’une certaine manière cela ne devrait pas exister, puisque tout a été bien prévu.
Et Sophie Aubert va aussi élargir le propos. Car c’est une praticienne puissamment réflexive, qui avait commencé une thèse sur le sujet, qui sait mobiliser les meilleurs experts et chercheurs.
Grâce à elle, nous avons la chance de rentrer dans le cœur du réacteur d’un sujet ultra sensible, dans l’une des entreprises les plus emblématiques et les plus connues au monde. C’est exceptionnel et nous sommes heureux de vous convier à ce moment de partage et d’échange.
Les mots-clés
Titulaire d'un master en ergonomie de l'Université de Bordeaux et d'un DEA en ergonomie obtenu au Cnam, Sophie Aubert débute sa carrière en 1996 au sein d'Airbus. Elle est ergonome spécialiste Human Factors sur les chaînes d'assemblage des avions civils à Toulouse.
Elle travaille au sein du service « Ergonomie et Performance industrielles » qui intervient sur deux pôles. D'une part sur la conception des moyens industriels des futures chaînes d'assemblage des avions et d'autre part sur l'optimisation des ateliers déjà existants.
Elle conçoit ainsi des moyens industriels, des organisations et des formations techniques pour les opérateurs. Et contribue également au développement de dispositifs de formation à la pratique par la pratique pour les opérateurs, visant à réduire la durée d'obtention de l'autonomie sur leurs postes.
Ses domaines d'intervention sont l'assemblage structural de l'avion, le montage des systèmes mécaniques et électriques, les tests des systèmes, l'assemblage de l'aménagement commercial et la peinture aéronautique.
Sophie Aubert est l'auteure de plusieurs articles dont :
- « Une ingénierie pédagogique et politique pour pérenniser les dispositifs de formation » (Education Permanente 2021/2 n° 227, pages 103 à 114)
- « Entre l’homme, son outil et la peinture : identifier des compétences incorporées au service des performances industrielles » avec Thibault Lamodière, Christophe Morize, Michel Récopé et Joffrey Beaujouan (54 ème Congrès International Société d’Ergonomie de Langue Française, 2019)
- « Concevoir et animer une formation de formateurs : retour d’expérience sur la contribution possible de l'ergonome » avec Joffrey Beaujouan et Fabien Coutarel (in « Les formateurs au travail. Conditions d'exercice, activités, interventions », éditions Octarès, 2019)
- « Concevoir un dispositif de formation par la pratique pour des opérateurs : une approche ergonomique de la conduite de projet » avec Joffrey Beaujouan et Fabien Coutarel (in « Analyses de l'activité - Perspectives pour la conception et la transformation des situations de travail, sous la direction de Christine Vidal-Gomel, éditions PUR, 2018)
- « Définition de parcours professionnel dans un contexte changeant : du bricolage local à une stratégie collective. Quel apport de l’ergonomie ? » (52 ème Congrès International Société d’Ergonomie de Langue Française, 2017)
- « Construction de l’intervention ergonomique. D’une préoccupation de montée en cadence à la décision d’investir pour transformer le travail : embûches et stratégies » avec Joffrey Beaujouan et Fabien Coutarel (Revue Pistes n° 17-2 | 2015)
- « Transformer la formation par l'analyse du travail : le cas des peintres aéronautiques » (Education Permanente 2000-2 n° 143, pages 51 à 63)
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Crédits
Amphi débat du 14/05/2024
Date d'édition : 30/08/2024
Durée : 1:17:48
Programmation et animation : Jean Besançon, directeur de l'Uodc
Réalisation et édition : Pierre Cécile
© Pratiques & Stratégies - septembre 2024 - reproduction interdite